mercredi 3 mai 2017

Hyakunin isshu, poème n° 73 : 高砂の


Retour à la nature et au paysage, avec ce poème du Moyen conseiller surnuméraire  - Gon Chûnagon - Oe no Masafusa (大江 匡房 ou 権中納言匡房). Le thème est "la contemplation au loin de cerisiers de montagne".

高砂の
尾の上の桜
咲きにけり
外山の霞
立たずもあらなむ

たかさごの おのえのさくら さきにけり とやまのかすみ たたずもあらなん 

高砂の : si 高砂 rappelle le poème 34, il ne s'agit probablement pas ici d'un nom de lieu, l'expression désignant simplement une montagne élevée. Littéralement 高 signifie haut, et 砂, sable. C'est sans doute pourquoi René Sieffert traduit cela par "dune" : il y voit l'originalité du poème (car les poèmes sur le fleurissement des cerisiers ne manquent pas), tout en trouvant l'image peu vraisemblable (il va jusqu'à se demander si l'auteur n'aurait pas abusé du saké !). A ma connaissance, Sieffert est le seul à avoir pris cette option. Michel Revon parle quant à lui de "pic aux sables accumulés", ce qui ne me convainc guère plus. Les commentateurs japonais et les traducteurs anglophones en restent à une plus vraisemblable montagne ;
尾の上の桜 : 尾 désigne normalement la queue d'un animal, mais le sens est ici complètement différent. 尾の上, c'est le sommet de la montagne, ou du moins un lieu élevé sur ses pentes. Après un second の/complément de nom, 桜 signifie bien sûr cerisier ;
咲きにけり : 咲き est la renyou-kei de 咲く, fleurir, à laquelle s'accroche, に renyou-kei de ぬ qui marque l'achèvement. Et けり s'accroche à tout cela pour ajouter une nuance d'étonnement et d'émotion ;
外山の霞 : 外山 (litt. montagne du dehors) désigne en fait une montagne proche par rapport à une montagne plus éloignée. Il s'agit ici d'un mont qui s'intercale entre le spectateur et la montagne sur laquelle fleurissent les cerisiers ; 霞 désigne la brume, notamment la brume un peu rosée que l'on peut voir au coucher et au lever du soleil. C'est un mot de saison associé au printemps, comme 桜 ;
立たずもあらなむ : 立た est la mizen-kei de 立つ (se lever), à laquelle s'attache la négation ず. も ajoute un peu d'emphase. あら est la mizen-kei de あり (le ある moderne), à laquelle s'accroche なむ, qui exprime le désir, le souhait.

En résumé, l'auteur souhaite qu'aucune brume ne se lève des montagnes proches pour ne pas masquer les cerisiers qui fleurissent au loin.


Sur les pentes des
hautes montagnes ont fleuri
les cerisiers
puisse la brume de ces monts
ne pas les voiler

Index en romaji : takasago no onoe no sakura sakinikeri toyama no kasumi tatazu mo aramu

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